Chapitre 3 —
Battambang
14 janvier 2024
Nous rejoignons Battambang en taxi partagé. C'est un classique, tout le monde s'entasse dedans et nous sommes encore une fois graciés de la présence de poules encartonnées.
Nous arrivons en début d'après-midi à Battambang, qui a gardé des traces de l'architecture coloniale française d'autrefois. Avant d'arriver ici, nous avons entendu deux sons de cloche différents : certains aiment mais d'autres trouvent qu'elle n'a que peu d'intérêt.
Conséquence de cette dichotomie, nous arrivons avec des attentes assez basses et sommes agréablement surpris. Le côté colonial qui tombe en ruine a donné naissance à quelques tentatives de street art, mais aussi à des rénovations qui gardent le charme des bâtiments. Par moment, cela nous rappelle un peu Georgetown (qui, bien que loin d'être parfaite, reste notre référence de ville coloniale en réhabilitation).
Première observation surprenante, on entend à certains endroits de très forts bruits d'oiseaux venant des étages supérieurs des immeubles. Nous apprendrons par la suite que, comme nous l'avions supposé, ces bruits sont des enregistrements rejoués sur des hauts parleurs, et comme nous ne l'avions pas supposé, qu'ils servent à attirer les hirondelles pour qu'elles viennent y faire leurs nids. C'est plus facile de les récolter que dans les caves des falaises.
Il y a un côté social marqué dans cette ville : beaucoup d'associations sont présentes pour aider les jeunes à sortir de la pauvreté, les former à un métier, etc. Ça se voit dans certains restaurants ou cafés qui mettent en avant leurs initiatives.
Parmi les activités à ne pas rater, il y a le cirque Phare.
Il s'agit plus précisément d'une école de cirque qui forme les jeunes Cambodgiens défavorisés aux arts du spectacle.
Les plus brillants et les plus motivés ont l'opportunité d'aller ensuite travailler au cirque de Siem Reap.
Battambang propose des représentations des élèves tous les deux jours.
Il y a tout un programme qui varie selon les jours et c'est un point de passage obligé lors d'un séjour ici.
Nous passons une heure à admirer des acrobaties parfaitement maîtrisées dans un spectacle au nom lourd de sens : Rouge. La musique est aussi réalisée par les élèves et s'inspire des sonorités locales.
Une autre excursion, un peu en dehors de la ville, nous mène aux killing caves. Le nom aussi ne laisse pas de place au doute : c'est dans ces caves que les Khmers Rouges ont menées leurs exécutions. Difficile d'ignorer le vertigineux puits en bas duquel des milliers d'innocents ont perdu la vie.
Pour changer d'atmosphère, on peut se balader dans le temple juste au-dessus. Au programme : de belles vues sur la vallée environnante et un troupeau de singes espiègles, motivés par la promesse de récompenses comestibles.
Tout ce trajet jusqu'aux grottes est bien justifié mais il reste un dernier élément touristique à honorer. Tous les soirs, au coucher du soleil, les chauves-souris prennent leur envol pour leur session de chasse nocturne. Elles s'envolent toutes d'une même ouverture pour se disperser dans la campagne environnante.
Pour en profiter, on peut s'installer sur les petites chaises en plastique prévues à cet effet, pour peu qu'on consomme quelque chose auprès des locaux. Donc à partir de 17:00–17:30, tout le monde s'installe et papote gentiment. Face aux rangées de sièges, une large paroi rocheuse est en cours de sculpture, probablement pour diversifier l'attrait du lieu. Peu après les 18:00, une chauve-souris semble donner le coup d'envoi et toutes les autres se réveillent et lui emboîtent le pas illico.
Ça fait un épais ruban qui s'échappe de la falaise, la longe sur quelques dizaines de mètres et va ensuite s'éparpiller un peu plus loin. Le spectacle peut durer une demi-heure et les estimations donnent 3 millions de petites bêtes qui résident à temps plein ici.
Une fois la nuit tombée, tout le monde repart zigzaguer en scooter sur les routes particulièrement sèches. Nous quittons Battambang encore pleins de poussière mais heureux d'avoir pu nous immerger dans ce parfait mélange de tourisme et de vie normale cambodgienne.