Travel Bellies

Chapitre 5 —

Se réfugier à Santa Cruz


24 juin 2023

La veille de notre départ de Sucre, nous avons ouvert notre trousse à médicaments pour gober chacun une petite pilule. Mais pourquoi donc ?
Et bien, parce que même si, à la lecture de ce blog, nous paraissons intrépides et aventureux, voire un peu foufous, il faut le dire, nous sommes quand même précautionneux.

Nous nous dirigeons vers la région tropicale de la Bolivie et donc à risque de paludisme. Une pilule par jour devrait suffire à éloigner ce mal. Santa Cruz et ses moustiques nous attendent et nous n'avons même pas peur !

Santa Cruz est un indice de plus que la Bolivie est un pays très polarisé. C'est la capitale économique du pays, mais ce n'est pas la capitale administrative, ni la capitale constitutionnelle.

Nous arrivons en milieu de journée à Santa Cruz et après une pause restauration, nous montons dans un collectivo pour une dizaine de minutes. Nous sommes déposés à côté d'une station essence, le long de la route qui mène au centre de Santa Cruz.
Nous sommes venus poser bagages dans un petit refuge qui accueille des animaux sauvages et soit les réhabilite, pour ceux qui peuvent l'être, soit s'en occupe pour ceux qui ne survivraient pas à une libération.

C'est chez des squatteurs ?

Nous nous sommes engagés à les aider pour une petite semaine avec leurs tâches quotidiennes. Cela consiste en deux parties principalement : la cuisine et le ménage. Ça tombe bien, la routine nous manque.
Ce que nous ne savions pas, c'est que l'association est installée à côté d'un parc animalier / base de loisir, qui tombe un peu en décrépitude et qui a besoin d'aide. C'est donc l'opportunité de les aider aussi et d'approcher d'autres types d'animaux.

L'association bénéficie gracieusement du terrain accompagné d'une maison. La maison mérite un bon lifting. Les rénovations étant faites surtout par les volontaires, cela n'est pas un projet très actif à l'échelle de notre séjour.

Au moins, il y a de l'électricité et de l'eau chaude. Il y a une cuisine équipée, des moustiquaires sur toutes les ouvertures, un toit qui ne fuit pas, quelques matelas et de l'eau potable. Le confort est sommaire mais on peut y vivre sans problème pour quelques jours. Et peut-être contribuer un peu aussi.

La petite maison dans la clairière, dans la jungle

Nous sommes accueillis par la responsable de l'association qui nous montre la maison, puis les animaux, plus loin sur le terrain (et aussi plus au calme) et nous emmène ensuite au parc voisin pour rencontrer le personnel et les animaux. Elle nous explique que les animaux secourus sont issus du trafic, que les gens les voient comme des animaux de compagnie et non pas des animaux sauvages. Elle connaît bien sûr le nom et l'histoire de chacun d'entre eux et nous nous rendons compte des dégâts que le trafic provoque.

Nos principaux protégés sont :

  • 5 coatis — pour imaginer ce à quoi ça ressemble, il faudrait prendre un oppossum, le colorier à moitié comme un raton-laveur et lui ajouter des couinements stridents
  • 7 capucins — des petits singes, de la taille d'un avant-bras environ. Eux aussi font des bruits stridents.
  • 2 tortues — elles errent paisiblement dans un enclos fait de tuiles à côté de la maison
  • Cappi — le chien de garde

Une fois les présentations faites, les instructions données, nous nous installons dans la chaleur et l'humidité suffocantes de notre nouvelle maison.
Pas de chance pour nous, nous sommes les seuls volontaires en ce moment. Nos colocataires seront les moustiques et les blattes.


Le premier jour de notre volontariat est un weekend. Nous avons la chance de rencontrer d'autres volontaires locaux à cette occasion. Tout le monde se retrouve à 9:00 pour préparer le repas. Au menu, des fruits, quelques légumes, de l'avoine et des œufs durs. Les plateaux repas prêts, toute l'équipe prend la direction des cages.

Ils mangent bien par ici

Nous nous familiarisons avec les animaux et le rituel qui accompagne le repas. Comme nous sommes un weekend, c'est aussi le moment de nettoyer les cages des coatis. À tour de rôle, nous les faisons entrer dans la cage centrale pour avoir le champ libre afin de nettoyer chaque cage individuelle. Une fois celle-ci propre, on les y appâte avec leurs repas et on passe à la cage suivante.

À table !

On passe ensuite aux capucins, très expressifs et très impatients de manger. Pas la peine de rentrer dans leurs cages : les plateaux sont déposés à leur portée et ils n'ont plus qu'à tendre le bras pour se nourrir.
Moment d'exception : la cage centrale a été récemment rénovée et Jorge le capucin est celui qui a le droit d'en profiter le premier. Il se comporte comme un capucin : il se pavane, nargue ses compères restés dans leurs cages, nous montre ses dents et nous fait savoir que cette cage est la sienne et que nous ne sommes pas les bienvenus.

Un singe qui fait la grimace, c'est un singe qui montre ses armes

Sur les coups de midi, nous terminons notre routine matinale. C'est temps libre jusqu'au lendemain 9:00. Nous grimpons dans un collectivo direction le centre-ville de Santa Cruz. Nous en ferons vite le tour : ce n'est pas une ville riche d'histoire ou de culture, en particulier en la comparant à Sucre que nous venons de quitter.

Le lendemain, on en remet une couche. Cette fois-ci, pas d'œuf dur mais un morceau de poulet. Nous avons enfin repéré lequel des coatis est celui qui demande des caresses et nous prenons vite le coup de main.

L'après-midi, nous prenons la direction d'un parc de l'ouest de Santa Cruz. Nous nous y offrons un moment de détente : il y a des piscines, un jardin et une forêt parfaitement entretenus. Cet endroit détient aussi le record du plus grand nénuphar du monde : 3,2 m ! Bien sûr, le nénuphar en question ne barbote plus dans la mare mais on peut observer sa réplique dans le pavillon qui lui est dédié.

Ils ne sont pas peu fiers de ce résultat

Les deux jours suivants, nous prêtons main forte à nos voisins : le parc Playland. Nous passons de 12 plateaux repas à des quantités de repas beaucoup plus industrielles. Bien que notre cheffe cuisinière eut préparé certains éléments en avance, nous y passerons 1h30 à trois le premier jour.

Elle est pas belle notre popote ?

Nous rejoignons ensuite un autre soigneur qui est plutôt dédié à la distribution des repas et l'entretien des cages. Ensemble, nous faisons la tournée des cages : certaines nous sont autorisées, d'autres non. Il y a un ordre à respecter pour la distribution et parfois cela est couplé à une session de ménage (surtout chez les oiseaux).

Qui a faim ?

Nous copinons avec certains animaux tandis que d'autres deviennent hystériques si nous mettons un pied dans leur cage. Les animaux, comme les humains, ont leurs affinités.

On distribue les grattouilles aussi

Les plus rigolos à nourrir sont les singes araignées, sur leur île. En effet, ils ont un singe dominant particulièrement agressif. C'est là qu'il est utile d'être à plusieurs.
D'un côté, il faut un responsable lancer de banane pour la distraction et de l'autre, il faut faire descendre un petit pont pour relier l'île et être prêts à arroser le chef du gang si la diversion des bananes ne suffit pas.

L'art subtil de la diversion

Nous reviendrons plus tard pour le repas des fauves, plutôt en fin d'après-midi. Ils sont issus du trafic : eux aussi étaient autrefois des animaux de compagnie. Sauf deux léopards qui sont le résultat d'un heureux hasard entre les résidents du parc.

Il est où mon steak ?

Les jours qui suivent, nous avons notre routine. Et quelle chance, nous avons même le droit à une vraie douche tropicale ! Nous nous sommes habitués à la lutte éternelle contre les moustiques, au hululement des singes sauvages et leurs déambulations sur le toit. Nous admirons les papillons du coin et surprenons parfois des colibris.
Peu à peu, nous découvrons les subtilités de ce nouvel environnement et ses habitants.

Enfin, notre dernier jour, nous sommes rejoints par deux nouveaux volontaires. Nous sommes contents d'avoir enfin un peu de compagnie, même pour une courte durée.

Allez, encore une photo de ces moments uniques